Présentation de la fiscalité des artistes-auteurs : 1ère mise au point de la mission fiscalité du ministère de la Culture

Dans le cadre des réunions de concertation, il est apparu que des clarifications s’avéraient nécessaires en matière de fiscalité des artistes-auteurs.

Face aux propos contradictoires qui circulent depuis longtemps, le CAAP a demandé la constitution d’un groupe de travail sur la fiscalité afin de lever toutes incertitudes. Une première réunion s’est tenue le 23 septembre 2019 en présence de membres de la mission fiscalité du ministère de la Culture.

La mission fiscalité a rappelé l’état du droit. Le document distribué en séance est en pdf en fin d’article.

1/ Par principe, les revenus des artistes-auteurs sont imposés en BNC

Principe d’imposition des artistes-auteurs  : les bénéfices non commerciaux sont définis comme les revenus issus de professions dans lesquelles l’activité intellectuelle joue un rôle principal et qui consistent en la pratique d’une science ou d’un art. Les revenus des artistes-auteurs (notamment droits d’auteur, ventes d’œuvre originales, ...) sont donc imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (article 92 du code général des impôts)

Le bénéfice est le résultat de la différence entre les recettes et les dépenses professionnelles.

  • Revenus imposables et modes déclaratifs

Deux options sont possibles :

• le « régime spécial » ou micro-BNC (frais forfaitaires)  : les frais sont évalués forfaitairement à 34% des recettes. L’artiste-auteur ne peut opter pour ce régime que si ses recettes sont inférieures à 70 000 € (HT).

• le « régime de la déclaration contrôlée » (frais réels)  : les frais professionnels sont déduits des recettes pour leur montant réel. L’artiste-auteur peut opter pour ce régime quel que soit le montant de ses recettes. Mais il y est obligatoirement soumis si ses recettes sont supérieures à 70 000 € (HT).
L’artiste-auteur peut opter pour l’application de l’article 100bis du code général des impôts (qui permet d’être imposé sur la moyenne de ses bénéfices sur 3 ou 5 ans).

2/ Par exception, certains droits d’auteur versés par certains tiers sont déclarés comme des traitements et salaires (TS)

Par dérogation au principe général, lorsqu’ils sont intégralement déclarés par des tiers, les produits des droits d’auteur sont soumis à l’impôt sur le revenu selon les règles prévues en matière de traitements et salaires (article 93-1quater du code général des impôts).

Qui sont les tiers déclarants fiscaux concernés ?
Certaines entités encaissent et versent des droits d’auteurs. Ces mêmes entités sont légalement tenues d’effectuer, sauf option expresse de l’artiste-auteur, une retenue à la source de la TVA (voir les articles 241et 285bis du code général des impôts).
Ces tiers déclarants fiscaux sont les éditeurs (de livres ou de presse), les producteurs (audiovisuels ou de phonogrammes) et les organismes de gestion collective (sociétés de perception et de répartition des droits, par exemple la SACEM, la SACD, etc.).

Ainsi, seuls les droits d’auteurs versés par des éditeurs, des producteurs ou des OGC sont déclarables comme des traitements et salaires (TS).
Remarque : les primes d’inédit et les avances forfaitaires (à valoir ou non sur les droits futurs) versées par les éditeurs font partie des « produits des droits d’auteur » visés par l’article 93-1quater.

NB : les artistes-auteurs peuvent opter pour déclarer en BNC leurs droits d’auteur versés par les éditeurs, producteurs ou OGC.

  • Revenus imposables et modes déclaratifs

Les recettes sont constituées du montant brut des droits d’auteur perçus effectivement au cours de l’année d’imposition. Pour les impôts, le montant des cotisations sociales obligatoires déductibles est à soustraire de ces recettes. Ensuite, les frais venant en déduction sont déterminés selon les règles applicables en matière de traitement et salaires. Deux options sont donc possibles soit la déduction forfaitaire de 10%, soit une déduction des frais réels.
L’artiste-auteur peut également opter pour l’application de l’article 100bis du code général des impôts.

3/ Conséquences pratiques pour les artistes-auteurs en matière de déclaration

Un artiste-auteur ne peut pas « panacher » comme bon lui semble ses déclarations de revenus en TS ou en BNC. Notamment il ne peut pas décider de déclarer en TS des revenus qui ne sont pas des droits d’auteur versés par des éditeurs, producteurs ou OGC (EPO dans la suite de cet article). En revanche, il peut opter pour déclarer en BNC des droits d’auteur versés par des EPO.

TOUT BNC : les artistes-auteurs qui ne perçoivent aucun droit d’auteur versé par des EPO déclarent obligatoirement la totalité de leur revenu en BNC.

Exemple : une plasticienne a perçu 4 000 € de ventes d’œuvres originales et facturé 500 € un atelier de pratique artistique. Elle déclare 4 500 € en BNC.

MIXTE BNC-TS : les artistes-auteurs qui perçoivent à la fois des droits d’auteur versés par des EPO et d’autres revenus artistiques (droits d’auteur, ventes d’œuvres originales, ateliers d’écriture ou de pratiques artistiques...) peuvent :
• soit déclarer leurs droits d’auteur versés par des EPO en TS et leurs autres revenus en BNC ;
• soit déclarer l’ensemble de leurs revenus en BNC.

Exemple : un illustrateur a perçu 2 000 € d’avance d’un éditeur, 1 300 € de droit d’auteur sur l’ensemble de ses publications, 100 € de droits de prêt en bibliothèque (versé par la Sofia, OGC) et facturé 500 € pour des lectures publiques de ses œuvres dans un collège ainsi que 1 000 € d’ateliers d’écriture.

Une partie de son revenu est déclarable en TS : 2 000 + 1 300 + 100 = 3 400 €
L’autre partie est déclarable en BNC : 500 + 1 000 = 1 500 €
Il a le choix entre déclarer chaque type de revenu dans sa « catégorie » (3 400 € en TS et 1 500 € en BNC) ou déclarer l’ensemble de ses revenus (3 400 + 1 500 = 4 900 €) en BNC.

TOUT TS OU TOUT BNC : Les artistes-auteurs qui perçoivent exclusivement des droits d’auteur versés par des EPO doivent les déclarer en TS ou opter pour les déclarer en BNC.

Exemple : une compositrice a perçu 2 500 € de droits d’auteur versés par la SACEM. Elle déclare 2 500 € en TS ou décide d’opter pour les déclarer en BNC.

4/ Quelles incidences des modalités de déclarations fiscales sur le revenu disponible d’un artiste-auteur ?

La CSG et la CDRS sont des impôts prélevés en même temps que les cotisations de sécurité sociale.
La TVA est un impôt indirect (théoriquement payé par le « consommateur final »).
L’impôt sur le revenu (IR) est un impôt direct payé par tout citoyen.

Les choix fiscaux opérés par un artiste-auteur ont une forte incidence sur son revenu disponible. En TS, la CSG et la CRDS ainsi que les cotisations de sécurité sociale sont plus élevées qu’en BNC. Que leurs revenus soient déclarés en TS ou en BNC, les artistes-auteurs sont assujettis à la TVA. Le montant de TVA versé au Trésor public est variable selon les choix fiscaux de l’artiste-auteur (renonciation ou non à la retenue à la source de la TVA, régime de la franchise en base de TVA, régime réel de TVA). Le revenu imposable de l’artiste-auteur dépend à la fois de son mode de déclaration (TS ou BNC et de son option pour frais réels ou forfaitaires) et de ses options concernant la TVA. L’imposition d’un artiste-auteur est généralement plus élevée en TS qu’en BNC.

Nous examinerons dans un autre article les modes de calcul et les incidences financières précises des modalités déclaratives et des choix fiscaux des artistes-auteurs.

Doc_mission_fiscalite_23_sept_2019