LES ARTS VISUELS DANS LA LOI RELATIVE À LA CRÉATION :

le courrier commun à la Ministre de la culture et nos 9 premières propositions d’amendements à l’avant-projet de loi relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine

En l’absence de concertation avec les professionnels du secteur des arts visuels, un groupe de travail ouvert initié par l’USOPAV (Union des Syndicats et Organisations Professionnelles des Arts visuels dont fait partie le CAAP) s’est constitué pour travailler sur des propositions d’amendements à la loi sur la création (voir notre article à ce sujet). Un courrier commun du groupe de travail adressé à la Ministre de la Culture a été envoyé le 23 février 2015. Il est accompagné d’une première série de 9 propositions d’amendement en vue de leur intégration dans le projet de loi sur la création avant son passage devant le Conseil d’Etat.

• Le courrier commun à la Ministre de la culture

Objet : l’absence des arts visuels dans l’avant-projet de loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine.

Madame la Ministre,

A notre connaissance le texte de l’avant-projet de loi relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine, qui doit passer prochainement devant le Conseil d’État avant d’être présenté en Conseil des ministres ne fait aucun cas des arts graphiques et plastiques.

Les acteurs des arts visuels ne comprennent pas cet état de fait qui les exclut de la loi sur la création artistique. Aujourd’hui plus que jamais il est impensable qu’une loi sur la liberté de création fasse l’impasse sur les auteurs d’arts visuels : dessinateurs, peintres, sculpteurs, photographes, graphistes, etc.

Devant l’urgence d’amender cet avant-projet de loi, un groupe de travail ouvert s’est constitué à l’initiative de l’USOPAV (Union des syndicats et organisations professionnelles des arts visuels), il est actuellement constitué des structures signataires du présent courrier.

Le partage et la transparence des rémunérations, le développement et la pérennisation de l’activité professionnelle, sont des sujets majeurs pour le champ des arts visuels, or ils n’ont jamais été véritablement traités.

Contrairement aux artistes-interprètes, les artistes-auteurs sont des travailleurs indépendants, non des salariés, leur situation économique et sociale ne cesse de se dégrader.

Le secteur des arts graphiques et plastiques est à la fois celui dont le poids économique arrive en tête dans la culture pour ce qui est du chiffre d’affaires et du nombre d’emplois [1], et celui dans lequel les premiers acteurs, les artistes-auteurs, sont les plus précaires et les plus mal traités (sous ou non rémunération de leur travail, absence de contrats, absence de barèmes, non respect des droits d’auteurs…).

L’ensemble de l’économie de l’art se fait à la fois grâce et au détriment des artistes-auteurs dont les rémunérations tiennent systématiquement lieu de variable d’ajustement. Cette « culture de la gratuité » attestée par les statistiques [2] est dénoncée depuis longtemps par les organisations professionnelles des arts visuels, sans avoir abouti à la mise en œuvre de solutions.

Le secteur des arts visuels n’est aucunement régulé, le partage de la valeur, le développement et la pérennisation de l’activité artistique, sont des sujets qui n’ont pas pu faire l’objet de discussions fructueuses entre les différents acteurs notamment faute d’instance nationale de dialogue spécifique (il n’existe pas de conseil national des professions des arts visuels).

Pour l’ensemble de ces raisons, exposées ici succinctement, des dispositions au sein de l’avant-projet de loi relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine, sont indispensables avec pour objectifs d’une part, de replacer les artistes au centre de la réflexion en assurant un partage de la valeur, une meilleure transparence et une plus grande protection de leurs droits et, d’autre part, de réguler les relations entre les artistes-auteurs et leurs diffuseurs.

Vous avez récemment déclaré au journal Libération : « Il n’y a pas de culture sans artistes, mais il n’y a pas d’artistes sans droits sociaux. Celle qui va se battre pour les droits sociaux a intérêt à se plonger un peu dans le code du travail et de protection sociale de temps en temps. Celle qui va défendre le droit d’auteur à Bruxelles a tout intérêt à se plonger dans les complexités de la politique européenne si elle veut porter haut et fort la parole des artistes. »

Nous partageons votre point de vue. C’est pourquoi dans un esprit de collaboration constructive, nous vous prions de trouver en annexe les premières propositions d’amendements de notre groupe de travail et vous demandons de bien vouloir en tenir compte dans la rédaction de l’avant-projet de loi. Nous ne manquerons pas de compléter ces propositions dans les meilleurs délais.

Dans l’attente de vous lire ou de vous rencontrer, nous vous prions d’agréer Madame la Ministre l’expression de notre considération distinguée.

CAAP (Comité des Artistes Auteurs Plasticiens)
SNAPcgt (Syndicat National des Artistes Plasticiens)
SAIF (Société des Auteurs de l’Image Fixe)
SNSP (Syndicat National des Sculpteurs et Plasticiens)
UNPI (Union Nationale des Peintres Illustrateurs)
UPP (Union des Photographes Professionnels)
USOPAV (Union des Syndicats et Organisations Professionnelles des Arts Visuels)



• Les premiers amendements proposés

Ils portent notamment sur (pour le détail voir pdf en bas de l’article) :

  • la création du Conseil national des professionnels des arts visuels ;
  • la création d’un fonds de soutien aux auteurs des arts visuels financé par un pourcentage sur la billetterie des Musées de France
  • le respect des droits sociaux et des droits d’auteurs par les diffuseurs publics ;
  • la négociation collective de barèmes minimaux de rémunération des auteurs des arts visuels ;
  • la nomination d’un médiateur favorisant l’adoption de codes des usages et la résolution amiable des litiges entre professionnels des arts visuels ;
  • l’obligation de contrats écrits entre professionnels des arts visuels ;
  • l’obligation d’une rémunération dans le code des marchés publics dès lors qu’un travail de conception spécifique est exigé ;
  • la sécurisation juridique du droit d’accès gratuit des auteurs des arts visuels dans les Musées de France ;
  • les premières modifications urgentes et nécessaires du code de la sécurité sociale visant à la consolidation des droits sociaux des artistes-auteurs dans le régime général.

Documents à télécharger

Lettre à Mme Fleur Pellerin